La nouvelle série d’œuvres réalisée par Isabelle Avanzini est dédiée au mouvement, à la danse, à la musique et au rêve. Le mouvement est rendu par la combinaison toujours inattendue des formes et des couleurs, par les déformations apportées aux personnages mis en scène, par le côté inachevé ou interrompu. C’est la stylisation et la spontanéité du coup de pinceau qui donnent cette vie et cet appétit, constitués de joie et de gaieté, ainsi que cet élan qui se communique au spectateur. Ce sont les dominantes roses, mauves et bleues qui vous envoûtent, vouant un culte dionysiaque, exaltant l’ivresse et l’abandon de soi au plaisir de la danse.
La danse nous renvoie, par son côté tribal, à la précédente série sur l’Africaine. Elle représente le moment ultime du mouvement corporel. Par son côté social et folklorique proche du rituel, elle introduit une dimension sacrée. Parce qu’il y a transgression des tabous, de la bienséance et de la maîtrise de soi, cette fête devient un moment magique, exceptionnel, qui permet à chacun, de temps en temps, de décompresser, de se libérer de ses contraintes, de retrouver un équilibre par l’expression de ses pulsions originelles ou de son animalité enfouie. Cette fantaisie semble provenir d’un spectacle de Comedia del Arte ou de cirque, peuplé de personnages masqués donc mystérieux mais en même temps exubérants et joyeux, vifs et hauts en couleurs à l’image d’Arlequin. Qu’elles soient virevoltantes ou alanguies, ces figures évoquent l’avidité et l’épanouissement, le plaisir des sens et l’enivrant désir des corps. La danse a une fonction cathartique car elle est purification par la libération du corps, lequel s’arrache à l’attraction terrestre en se soumettant à l’enchantement de la musique.
Par les symboles utilisés, la musique a ici une présence physique. Les notes deviennent baguettes de chef d’orchestre, battant la cdence, tentant de faire éclater les volutes bleues comme des bulles de savon, et trinquant avec de pétillantes coupes qui vous enveloppent et vous transportent dans un monde onirique et merveilleux, fait de jardins où la douceur de vivre le dispute à l’enchantement de la beauté, toujours présente, troujours affirmée, toujours en symbiose, même avec la déchéance ou la pourriture d’où elle naît et dont elle se nourrit, traduites ici par l’insignifiance d’une arrête de poisson.
D’autres symboles restent à décrypter que chaque spectateur aura la charge d’adapter à son vécu et à son ressenti.
Œuvres de maturité de l’artiste et hommage aux grands maîtres, ces toiles mettent le spectateur entre parenthèses, lui intiment l’ordre de se rappeler de son enfance, de voir la vie comme une fête rêvée dont il faudra se souvenir pour résister aux pressions de la vie quotidienne, pour que cette exaltation reçue devienne une force intérieure, comme une façon de recharger les batteries et de vivre en confiance. Ces créations renforcent l’âme, la justesse des couleurs fait mouche et percute le spectateur : c’est le passage sacré car quasi miraculeux du « rien » au « tout », par la seule force de l’émotion traduite de l’image plastique.